Cie Des animaux en Paradis

Une loge, celle des meetings, celle où l’homme blessé lèche ses plaies, celle, surtout, où l’acteur arrange son déguisement : le « Patron » a revêtu tous les masques possibles.

Avec décalage, Léo Cohen-Paperman retrace, dans ce spectacle remarqué au Festival off d’Avignon, la course saisissante de l’homme politique avec des répliques redoutablement aiguisées. Le formidable comédien Julien Campani déploie la silhouette encombrée du « bulldozer » sans verser dans la grimace, du théâtre de tréteaux à la satire politique, en passant par le récit social. Son charme opère sur un fil, entre raideur et prestance. On rit beaucoup, mais pas seulement ; derrière la séduction badine du fauve politique perce la mélancolie. Car il s’agit aussi de parler de ceux qui ont traversé l’époque, des gens d’origine modeste qui ont subi des changements économiques.
Les Chirac se succèdent et ne se ressemblent pas dans cette véritable performance d’acteur ; « techno » maladroit des années 70, qui cherche encore son ton ; bête de scène des années 80 ; vieux roi sans couronne du dernier quinquennat. Chirac ne s’arrête jamais. Un régal !

Entretien avec Léo Cohen-Paperman, directeur artistique de la Compagnie Des Animaux en Paradis, co-auteur et metteur en scène de la série Huit rois (nos présidents).

Huit rois (nos présidents), qu’est-ce que c’est ?
C’est une série théâtrale dont l’objectif est de faire le portrait de chacun des huit Présidents de la Cinquième République, de Charles de Gaulle à Emmanuel Macron.

Comment définissez-vous le théâtre que vous faites ?
Populaire et politique, je veux parler du peuple. Les narrateurs des spectacles sont des personnages de fiction issus du peuple. L’objectif est de raconter un pays dans sa diversité : de la France paysanne à celle issue de l’immigration, la série embrasse une totalité.

Pouvez-vous nous dire ce que l’on va découvrir pour ce week-end de spectacles présidentiels ?
Le Chirac sera une comédie onirique qui pose la question : c’est quoi être populaire ? Je crois que c’est la grande question pour Jacques Chirac.
Le roman de Chirac — si populaire et si contradictoire — sera peut-être un révélateur de nos mémoires et de nos oublis, de nos bégaiements et de nos métamorphoses.
Génération Mitterrand, est raconté par trois personnes qui ont voté pour lui en 1981 et qui se rendent compte en 2022 qu’elles ont voté Macron, Mélenchon et Le Pen. Elles racontent leur déception, leurs espoirs et leurs désillusions. Comment et pourquoi cette génération a explosé en vol ?
Le dîner chez les Français de Valéry Giscard d’Estaing, c’est l’histoire d’une famille française qui reçoit le président à dîner. Ce dîner va durer de 1974 à 1981 et il sera la métaphore du mandat. Imaginez un dîner où on a très envie de recevoir un invité de marque et un dîner qui se finit très mal avec ce même invité qui s’en va en disant « Au revoir ».
À chaque Président sera attribuée la forme scénique qui traduit son incarnation du pouvoir : comédie télévisuelle pour Giscard d’Estaing ; drame social pour Mitterrand et comédie métathéâtrale pour Chirac.

Presse

 » Une pièce sur Chirac ! On pouvait s’attendre au pire. Craindre une succession de tableaux avec anecdotes et resucées de discours, sur fond de nostalgie molle – celle qu’on éprouve pour un temps révolu où les enjeux semblaient moins vitaux. C’est tout autre chose que proposent Léo-Cohen Paperman et Julien Campani avec leur pièce Vie et Mort de J. Chirac, Roi des Français : un portrait sombre et subtil de l’ancien président, qui scrute l’homme derrière l’icône. Cette création s’inscrit dans un cycle dévolu aux huit présidents de la Ve République.
À l’évidence, les deux auteurs ont lu tout ce qui a été écrit sur Jacques Chirac, mais ils ont su l’oublier et faire du théâtre. Oubliez la marionnette des Guignols : par la grâce de l’incarnation, l’étonnant Julien Campani déploie la silhouette encombrée du « bulldozer » sans verser dans la grimace, qu’il laisse aux chansonniers d’hier et d’aujourd’hui. Son charme opère sur un fil, entre raideur et prestance. On rit beaucoup, mais pas seulement : derrière la séduction badine du fauve politique percent la mélancolie et le mépris de soi.
Chirac se coke
La voix de Chirac emplit le théâtre. Ses mots sont un babillage creux de marchand de rêve ; langue de bois de vieux roublard, mais aussi défense contre l’angoisse du vide. Après quoi court Chirac ? C’est l’énigme que pose cette pièce. Pour tout décor, une loge : celle d’avant les meetings. Celle, aussi, où l’homme blessé lèche ses plaies.
Celle, surtout, où l’acteur arrange son masque. Les Chirac se succèdent et ne se ressemblent pas : « techno » maladroit et péremptoire des années 70, qui cherche encore son ton – comme un acteur histrionique s’essaierait à plus de justesse – ; bête de scène des années 80, qui se coke sur fond de musique pop ; vieux roi sans couronne du dernier quinquennat. Chirac ne s’arrête jamais, il ne sait pas quoi faire de son énergie alors il la jette dans la bataille. Est-il libéral, gaulliste, tiers-mondiste ? Il ne le sait pas lui-même et le demande aux autres : son mentor Pierre Juillet, mais aussi son chauffeur, tous deux joués par l’excellent Clovis Fouin.
Chirac en berline
Grimé en pierrot lunaire, le dernier Chirac est le plus touchant : son maquillage coule comme le rimmel d’une ex-reine de beauté dans un film de Billy Wider. Il répète ses rôles qui l’ont porté aux nues, hagard, sous les sifflets. La scène finale, un trajet en berline vers une destination inconnue, avec son chauffeur en guise de Charon, est superbe. Pourquoi tant de tendresse pour Chirac, de la part d’un metteur en scène et de ses acteurs ? Peut-être parce qu’il était, d’une certaine façon, un des leurs.
Abel Quentin – MARIANNE

Distribution

Texte : Julien Campani et Léo Cohen-Paperman
Mise en scène : Léo Cohen- Paperman
Avec : Julien Campani et Clovis Fouin
Lumières : Pablo Roy
Création sonore : Lucas Lelièvre
Régie son : David Blondel
Assistante mise en scène : Gaia Singer
Scénographie : Henri Leutner
Costumes : Manon Naudet
Maquillage : Djiola Méhée
Photographies : Simon Loiseau
Captation vidéo : Anne-Laure Caquineau
Administration : Fabienne Christophle / GEF
Administration – Production : Léonie Lenain
Attachée de production : Blanche Rivière
Communication – Médiation : Lucile Reynaud
Diffusion : Anne-Sophie Boulan

Production

Coproduction : Compagnie des Animaux en paradis avec le Théâtre Louis Jouvet, scène conventionnée d’intérêt national de Rethel, Transversales, scène conventionnée de Verdun et le Salmanazar d’Epernay.
Avec le soutien de : la DRAC Grand Est, de la Région Grand Est, de la Ville de Reims, de Furies et de la SPEDIDAM. Cette action s’inscrit dans le cadre de la résidence partagée de la compagnie des Animaux en paradis en région Grand Est, réalisée en partenariat avec : le Théâtre Louis Jouvet – scène conventionnée d’intérêt national de Rethel, Le Salmanazar – scène de création et de diffusion d’Epernay, le Théâtre de La Madeleine – scène conventionnée de Troyes, le Théâtre municipal de Charleville-Mézières, la Maison des jeunes et de la culture Calonne de Sedan, l’Espace Jean Vilar de Revin et La Filature – espace culturel de Bazancourt.

Complet

Dates et horaires

Durée

  • Durée 1h20

Tarif